Le Serbe, même le plus modeste et timide, exprime souvent une fierté évidente et péremptoire. D'aucuns s'étonneront et beaucoup
fustigeront cette marque d'appartenance un peu trop prononcée. Mais il faut être allé en Serbie pour comprendre le passé de ce peuple dessiné entre
les méandres de la Sava et du Danube. Il faut avoir discuté avec ses habitants, et pour les plus chanceux, avoir festoyés avec eux pour s'apercevoir
de l'erreur de jugement et de l'incompréhension inouis dont sont victimes les Serbes.
Il ne s'agit en fait que d'envie. L'envie d'être Serbe, de s'appartenir et de profiter enfin.
Le peuple serbe n'a que peu de fois dans son histoire pu décider pour lui même. Souvent attaqué, souvent occupé, il a rencontré des difficultés
innombrables à développer une culture et à l'inscrire obtensiblement aux yeux de tous. C'est pourtant ce miracle que les Serbes accomplissent aujourd'hui.
Si la marque de ces passages étrangers existe n'y voyez là ni intégration ni assimilation. Le processus d'appropriation est continu et le foyer
des familles le coffre protecteur des secrets bien gardés.
Il reste en toute chose, en filigrane, le voile d'une âme serbe ancrée et ancienne nourrie par une foi profonde, une solidarité et une appartenance non dissimulée à une terre
que les Serbes occupent depuis si longtemps.
Un sentiment habite rapidement le voyageur en Serbie. Celui du devoir d'acuité, de l'obligation faite à chacun de regarder plus en profondeur.
Que la vérité des choses vues ou mangées réside moins dans les formes du réel que dans l'âme qui les anime.